Une certaine vision de la santé

30/10/2018

Notre système de santé est l’un des plus performants au monde, mais il est confronté au vieillissement de la population et au développement des maladies chroniques. D’autres défis sont à relever : la progression constante du coût des soins, la pénurie d’offre dans certaines parties du pays et les inégalités entre les citoyens face à leur santé. En Belgique, théoriquement, les soins sont les mêmes pour tous. Or, un ouvrier a une espérance de vie de 7 ans inférieure à celle d’un cadre. Le travail, le logement, l’environnement, l’alimentation, le stress, la consommation d’alcool et de tabac, la sédentarité, le niveau d’information, …autant de facteurs qui expliquent ces disparités.

L’existence d’inégalités sociales de santé est une réalité. Elle doit constituer une préoccupation majeure des responsables politiques. La Commission européenne attire d’ailleurs l’attention des Etats-membres sur l’augmentation de ces inégalités et sur la nécessité de « trouver des moyens novateurs pour toucher efficacement les groupes défavorisés ».

Les causes de cette précarité se situent bien en amont de la demande d’accompagnement. Le concept de « santé dans toutes les politiques » mis en avant par l’OMS prend ici tout son sens et fait son chemin parmi les décideurs. Il est inscrit dans le Plan de promotion de la santé 2018-2022 du Gouvernement francophone bruxellois, dans le Plan santé de la Cocom et dans les protocoles liant les Ministres au sein de la Conférence interministérielle de la santé publique. Il implique une concertation large, bien au-delà de la seule compétence « santé ».

Les spécificités de Bruxelles sont souvent soulignées : son caractère exclusivement urbain, sa diversité culturelle, sa population plus jeune en comparaison des deux autres régions, la précarité dans certains quartiers, sa complexité institutionnelle… Mais aussi un tissu associatif très riche. Tout cela en fait un véritable laboratoire.

Les acteurs de terrain le rappellent régulièrement : ils sont confrontés à des populations de plus en plus précaires, plongées dans des situations de plus en plus difficiles, formulant des demandes de plus en plus complexes. Loin du fatalisme, ces acteurs réagissent. Ils mettent leurs constats en commun, les relayent auprès des décideurs et développent des « bonnes pratiques ». Mon rôle comme responsable politique est de les écouter, d’analyser et de coconstruire des pistes d’amélioration et des solutions innovantes.

Depuis cette législature, la Commission communautaire française exerce la compétence de la promotion de la santé. Avec un décret ambitieux et un plan détaillé, de nouveaux axes de travail sont proposés aux acteurs de terrain : soutien aux approches intersectorielles et à la participation des usagers, lutte renforcée contre les inégalités, préoccupation transversale pour le genre, appui aux actions utilisant les nouvelles technologies de l’information, etc.

Ces axes viennent compléter une vision de la santé basée sur l’accessibilité, la proximité, la qualité. Cette vision favorise une approche globale de la santé qui renforce notamment les capacités des individus et des collectifs à l’échelle locale.

L’usager est au centre de cette vision. Demain, nous pouvons aller encore plus loin, en décloisonnant davantage les domaines d’intervention et en encourageant les services à s’adapter en continu aux besoins changeants de la population. Cela exige de disposer d’une photographie rigoureuse des problématiques, de faire preuve de souplesse, de poser un regard critique sur ses propres actions, de faire preuve d’inventivité… Les premiers pas d’une réforme ambitieuse sont posés. Le travail doit se poursuivre dans les années à venir, en concertation avec le terrain.

La santé est un révélateur de l’état d’une société. La politique de santé doit être un moteur de changement social. Elle doit se construire avec les citoyens, dans une optique de démocratie sanitaire. C’est ma conviction, il en va de notre bien-être à toutes et tous.

Cécile Jodogne